Action en garantie des vices cachés : attention au délai biennal de forclusion !

Par un arrêt publié du 5 janvier 2022, la troisième Chambre civile de la Cour de cassation juge que le délai de deux ans pendant lequel doit être intentée l'action résultant de vices rédhibitoires est un délai de forclusion qui n'est pas susceptible de suspension, mais qui peut être interrompu par une demande en justice jusqu'à l'extinction de l'instance.

11 janvier 2022

Dans cette affaire, un particulier ayant acquis une maison a eu la mauvaise surprise de découvrir, trois ans après la vente, que l’installation d’assainissement était vétuste, incomplète et polluante.

Par une ordonnance de référé du 24 juillet 2013, l’intéressé a fait nommer un expert judiciaire, qui a rendu son rapport le 20 novembre 2015. Le 28 juillet 2016, le vendeur a assigné les vendeurs et le notaire en nullité de la vente pour dol, erreur sur les qualités substantielles, ainsi qu’en paiement de dommages et intérêts.

Mais, par un arrêt du 15 septembre 2020 rendu sur le fondement de l’article 1648 du code civil, la Cour d’appel de Rennes a jugé irrecevable son action au motif qu’elle était tardive, faute pour celle-ci d’avoir été initiée dans le délai de deux ans suivant la désignation de l’expert, soit avant le 24 juillet 2015.

Devant la Cour de cassation, le demandeur au pourvoi soutenait en substance que sa demande d’expertise avait interrompu le délai de prescription, lequel se trouvait suspendu le temps de l’expertise, et recommençait à courir à compter du dépôt du rapport, conformément aux dispositions des articles 2239 et 2240 du code civil. 

Mais, selon les Hauts magistrats, il résulte de l’article 2220 du code civil que les dispositions régissant la prescription extinctive ne sont pas applicables aux délais de forclusion, de sorte que la suspension de la prescription prévue par l'article 2239 du code civil n'est pas applicable aux délais de forclusion. Concrètement, le délai de forclusion recommence donc à courir le jour de désignation de l'expert judiciaire.

Si la solution apparaît fondée en droit, elle n’est pas sans poser difficulté d’un point de vue pratique. En effet, compte tenu des délais souvent longs des expertises judiciaires, il n’est pas toujours acquis de pouvoir obtenir un rapport dans le délai resserré de deux ans prévu par l’article 1648 du code civil. Le demandeur sera donc souvent contraint d’agir en justice avant même de pouvoir disposer du rapport d’expertise.

Pour lire l'arrêt : https://www.doctrine.fr/d/CASS/2022/CASSP69884B8B15F6FDB17F3A